Errance
François a commencé à voyager
très jeune. Il n'a jamais envisagé sa vie autrement et le
voyage a toujours été pour lui un refuge, sinon la seule
option. Plutôt que passion ou fuite devant ce qu'on a
l'habitude d'appeler nos responsabilités, c'était pour lui un
besoin. Les circonstances l'y ont aidé et ses capacités
physiques et intellectuelles lui ont donné des atouts. Très
vite il a parlé anglais, puis espagnol, ensuite il a tenté
d'apprendre d'autres langues, celles des pays qu'il visitait.
Il nageait remarquablement, il courrait vite, skiait bien,
mais il a toujours été attiré par la mer et les bateaux à
voiles, plus que par les sports mécaniques.
C'était un garçon gentil, attentionné et tolérant. On pouvait
le considérer comme bizarre, hors normes, rêveur, voire
idéaliste, en même temps que charmant et bien élevé. Il avait
beaucoup d'amis véritables et il était aimé de tous les
membres de sa famille. A 33 ans, il a consigné les détails de
sa vie dans un récit de plus de 60 pages A4 (61 000 mots). Il
en avait distribué quelques copies scannées où il s'explique .
"Dans ces récits de voyages sont rassemblés les
éléments de ma vie autour de voyages décrivant mon
évolution, l’enfance , l’adolescence, l’errance,
l’émigration". Il l'avait intitulé "Récits d'un schizophrène en
voyage" afin que nul n'en ignore.
Ce n'est pas une œuvre littéraire, au sens propre du terme,
mais c'est sa vie. Soyez persuadé qu'il ne ment pas dans ce
qu'il raconte, il a même le culot de décrire ce qu'il a dans
la tête, ce qu'il pense réellement, sans tricher. Il a eu
des moments heureux, exaltants, mais il a souffert, a été
malheureux. Il voyageait dans des conditions extrêmement
précaires, 80% de son budget étant consacré aux moyens de
transport, il dormait n'importe où et mangeait n'importe
quoi, souvent jeûnait, il vagabondait. Il a souvent pris des
risques et pourtant il ne lui est rien arrivé.
Nous avons pu reconstituer ses
voyages, grâce à ses récits, pour la période de 74 à 93, d'une
part, et ses 6 passeports de 82 à 2003, le dernier de 2004 à
2010, perdu ou à lui dérobé lors d'un voyage en Italie. À
partir de 2010, il ne voyageait plus qu'en Europe, où sa carte
d'identité suffisait. Les 5 dernières années il ne quittait
plus son appartement ni Toulon, et les deux dernières, il ne
sortait plus le soir.