Gérard Philipe, un acteur populaire à la Cinémathèque


Cécile Marchand Ménard

Publié le 06/12/22

Fils de bonne famille, Gérard Philipe était proche du PCF jusqu’en 1956. Il a même enregistré des textes de Karl Marx ! Famille Philipe - Temps Noir - France Televisios - TV5 Monde

L’acteur n’était pas que la star du cinéma des années 50. Il fut aussi un militant indéfectible du théâtre pour tous aux côtés de Jean Vilar.

Intrépide soldat dans Fanfan la Tulipe ou secrétaire de gouverneur tiraillé dans La fièvre monte à El Pao au cinéma, bouleversant don Rodrigue dans Le Cid ou plus confidentiel prince Frédéric dans Le Prince de Hombourg, mis en scène par Jean Vilar au théâtre : en dix-sept ans d’une carrière brutalement interrompue, plus de quarante rôles au cinéma et près de trente sur les planches, Gérard Philipe s’est imposé comme une icône des années 1950. Une rétrospective à la Cinémathèque rend hommage au comédien, décédé d’un cancer foudroyant en 1959 et qui aurait eu 100 ans cette année. En préambule, le documentariste Patrick Jeudy célèbre l’acteur mais aussi le citoyen engagé pour un théâtre populaire, dans son documentaire Le Dernier Hiver du Cid. Entretien.

Cent ans après la naissance de Gérard Philipe, que retient-on de cet homme de cinéma et de théâtre ?
Gérard Philipe, c’est d’abord de grands rôles. Fanfan la Tulipe marque encore des générations de cinéphiles. Il a aussi incarné le Cid au théâtre. Il ne reste que des captations sonores de ces représentations, bouleversantes. L’allure, le panache et cette voix qui portait… On imagine son succès dans les grandes salles du Théâtre national populaire (TNP) tout comme à Avignon. Et puis Philipe défendait aussi des textes rares ou plus confidentiels. Dès ses débuts, il a pris des risques en jouant des textes d’Henri Pichette (1924-2000). C’était aussi un artiste engagé. Il a été le premier président du Syndicat français des acteurs et s’est battu pour défendre leurs droits. Il a renoncé à des cachets, à des scènes prestigieuses pour vivre l’aventure du TNP. Il ne se voyait pas devenir un notable, un comédien installé, attendu.

“Toute sa vie, il a porté un désir d’égalité et de justice”

Quel fut l’engagement de Gérard Philipe auprès du TNP ?
Après une occasion manquée, encouragé par son épouse, Anne, il a rejoint en 1951 l’aventure de Jean Vilar, directeur du TNP, d’abord à Suresnes, puis à Chaillot. Ils avaient le désir d’ouvrir le théâtre, de proposer de grands textes, dans des salles immenses, à des prix abordables. C’était une offre culturelle majeure à l’époque. Ils sont allés chercher un public populaire qui n’avait pas accès à de telles représentations. Toute une génération de comédiens, pour beaucoup disparus, est également passée par le TNP : Jeanne Moreau, Annie Girardot, Philippe Noiret…

Au-delà des engagements du comédien, quels étaient ceux du citoyen ?
Contrairement à son père, propriétaire d’hôtels sur la Côte d’Azur qui a fait affaire avec l’ennemi, Gérard Philipe s’est engagé dans la Résistance au moment de la libération de Paris, comme beaucoup de jeunes gens. Il est notamment devenu le porte-parole de Roger Stéphane, grande figure de la Libération, alors que ce dernier était aphone. Dans l’immédiat après-guerre, il s’est rapproché du parti communiste, qui correspondait à ses valeurs, du moins jusqu’en 1956 et la gueule de bois qu’a suscitée l’insurrection de Budapest. Il s’est engagé contre l’armement nucléaire. Il nous reste même des enregistrements de textes de Karl Marx lus par Gérard Philipe ! Toute sa vie, il a porté un désir d’égalité et de justice.

Rétrospective « Gérard Philipe, ou le romantisme ruiné ». Du 7 au 22 décembre. Cinémathèque française, 51, rue de Bercy, 12ᵉ. 5,50-7€.

Gérard Philipe lit le Petit Prince

suivi  de  la chanson d'Esther Ofarim

 Un prince en Avignon







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